mercredi 20 juin 2018

Juin

Le mois de juin se termine, le temps continue de passer même si pour moi, une partie reste figée en mai.

On a repris l'école et le travail. C'est la fin d'année, on sent que les enfants comme les maîtresses n'attendent plus que les vacances.

Nous avons reçu les bulletins, et globalement c'est très positif. Dragon1 a passé ses tests standardisés de fin d'année la semaine de son retour et a la note maximale en anglais et "high above average" en maths (avec une petite note de la maîtresse qui pense que ce n'est pas un bon reflet et qu'il aurait pu faire mieux). Petite surprise, il est excellent en gaélique, alors que contrairement à son frère il n'en parle jamais (ça ne l'intéresse pas, dit-il). La production écrite reste son point faible, et l'éducation physique. Un vrai geek quoi.
D'ailleurs, depuis la semaine dernière, il a même le look qui va avec (début de myopie, il a maintenant des lunettes à porter en classe uniquement). Il est plutôt content.



Dragon2 se débrouille bien aussi. Il a de super notes en maths et en lecture, s'est vraiment beaucoup ouvert cette année et est maintenant bien intégré, demande à participer aux cours de la classe plutôt que d'aller avec sa support teacher, donc les soutiens ont été beaucoup diminués. Il aime et se débrouille assez bien en éducation physique. En revanche, l'écriture et l'indépendance/organisation sont encore bof-bof. Bref, de gros progrès. Il y a un risque de devoir remettre un peu plus de soutien avec le passage en First Class l'année prochaine (cours plus "formels", journées plus longues...) mais les maîtresses en ont conscience. On réevaluera après la rentrée.

Du tout bon, donc, pour mes dragonets rayés.

A la maison, on gère le deuil comme on peut. Bien qu'ils mènent leur vie avec la même énergie qu'à l'accoutumée, de petits signes montrent que ça travaille là-haut. Ils sont tous les deux en demande de câlins ++. Peut-être aussi parce qu'ils me sentent triste, je ne compte plus le nombre de bisous spontanés ou de déclaration d'amour que je reçois dans la journée. Ca aide.
En même temps, ils ont lourdement conscience que rien n'est infini, pas même une maman. Au fil des jours (des nuits surtout), ils peuvent dire à quel point ils seront tristes quand je mourrai, et qu'ils voudraient mourir le même jour que moi, ou apprendre à réanimer pour que "si (je) sens que (je) meure un peu" ils puissent me sauver. C'est dur de leur répondre. Je suis encore jeune, je suis en bonne santé, j'ai pas l'intention de mourir tout de suite (oui, mais voilà des fois, ça ne suffit pas, et cette vérité là, elle flotte près de nous, et j'aurais aimé qu'ils l'ignorent encore un moment).

Papi apparaît dans les conversations alors qu'il en faisait très peu partie jusqu'à maintenant : passer devant la piscine rappelle la fois où il avait accompagné à la leçon de natation, ou les deux carrés de chocolat du goûter font une croix "comme sur le cercueil de Papi".

Dimanche dernier a été une journée difficile. 1 mois pile et la fête des Pères, les messages partout qui disent "To an amazing Dad !". Un mois seulement. C'est à peine croyable.

Moi, je suis je pense en phase "dépression" du processus de deuil. La tristesse aigüe m'a quittée, je ne pleure plus aussi souvent, mais j'ai le cerveau lent et comme anesthésié, et tout me demande une énergie plus importante. J'étais contente que le service soit calme la semaine dernière parce que même comme ça, je suis claquée (et aussi un peu sans doute parce que j'ai choppé le virus à la mode). J'ai bien fait de couper mes cheveux, ils tombent par poignées. Le choc, j'imagine.
J'avance à la petite semaine, et bien que je sache qu'il est temps de réfléchir aux grandes orientations de notre vie, je n'en n'ai juste pas les capacités à présent. Il est plus sage de se laisser porter et d'attendre que l'énergie / l'envie reviennent.
Je dors. Les anti-histaminiques me font office de béquille, ma fatigue a raison de moi le soir et je dors. Je ne rêve pas trop, ce qui est une bonne chose car mes rêves ont toujours été très limpides à analyser, et les deux ou trois dont je me souviens depuis le mois dernier m'ont laissé une sale impression de tristesse et d'angoisse dont j'ai à chaque fois mis deux bonnes heures à me débarrasser le matin venu. Donc, c'est mieux si je ne rêve pas.
Dimanche dernier, ayant ouvert l'oeil à 7h, j'ai décidé de rester au lit un peu, et je me suis réveillée à 10h ! Genre le truc qui n'a pas dû m'arriver depuis une dizaine d'années. L'incubation du virus était probablement en cause aussi.

Bref, j'essaie d'être gentille avec moi-même, je fais plein de câlins/bisous à mes enfants, je me blottis contre mon mari le soir et je téléphone beaucoup à ma maman. C'est à peu près tout ce qu'on peut faire, je crois.

La semaine prochaine, elle arrive pour passer du temps avec nous. Je serai en vacances et les enfants aussi, et la météo prévoit une vague de chaleur inédite avec des températures atteignant les 28°C !! On ira à la plage ;) En attendant, il vente, il bruine, et il fait 17°C, et c'est déjà pas si mal...

jeudi 7 juin 2018

Roger

Roger est vieux. Il présente bien mais il est un peu poussif, plus très à la page. Un peu comme un vieux monsieur un peu ronchon mais qui sait ce qu'il fait. Il fume un peu, peine dans les côtes, a quelques fuites, grince le matin. Mais il fait son job. C'est qu'il a quelques kilomètres au compteur, Roger. 189273 très exactement. Si je devais baptiser mon véhicule, c'est définitivement Roger que j'utiliserais.

Bref, Roger doit passer sa visite annuelle, et jusqu'à présent il s'en sortait comme un jeune homme. Sauf que cette année, il a été recalé. Paraît qu'il a les roues pas droites. Donc je l'ai emmené chez le garagiste, qui lui a donné une petite tape dans le dos, ne m'a pas fait payer et j'avais pris rendez-vous pour le re-test.

Manque de bol, il a fallu repousser pour causes d'événements intercurrents. C'est donc MonsieurDragon, rentré plus tôt de France, qui l'a emmené au dernier jour de la date de validité. Manque de bol encore, Roger a de nouveau été recalé. Cette fois, on est hors la loi. Théoriquement, faut tout reprendre à zéro et repayer le test entier, mais la dame du téléphone a été très gentille, elle a annulé la surfacturation pour changement de rendez-vous au dernier moment et me fait une ristourne sur le prochain test...

Donc parmi les choses urgentes à faire en rentrant à la maison, il fallait s'occuper de Roger. Nouvelle visite chez un autre garagiste cette fois (comme j'ai payé, j'espère qu'il a fait son boulot et lui a remis les roues droites, au moins assez pour rentrer dans les bonnes cases...) et nouveau rendez-vous au centre de contrôle technique pour demain.

Et puis ce matin, sur l'autoroute, le rétroviseur passager de Roger se met à vibrer. Genre vraiment beaucoup. Genre ça me gêne pour conduire. Genre le miroir va se casser la gueule, et là dans ma tête et j'entends déjà le "pling" cristallin du truc qui s'écrase sur la chaussée et le "Sorry, love" de la dame de demain qui m'explique que les roues ça va mais que sans rétroviseur, pas de petit papier rond à accrocher à mon pare-brise. J'ai envie de pleurer.
Mais comme j'ai beaucoup regardé McGiver dans ma jeunesse, je m'arrête dans une station service, j'achète un paquet de chewing gums, j'en mâche trois, et je colle ma boule avec ce petit sentiment d'être une vraie délinquante alors qu'en fait, bon, c'est ma voiture et je colle des chewing-gums sur le rétro si je veux.
Ca marche... un peu.

Disons que ça vibre moins, mais pas de bol, il fait beau et chaud en Irlande en ce moment et le chewing-gum, ça s'étire. Je ne dépasse pas 110 sur l'autoroute, j'évite soigneusement les nids de poule, mais malgré tout, le blob s'affaisse. Suffisamment lentement néanmoins pour parvenir à la maison avec un miroir entier (et un peu baveux/sucré).

Là, j'ai sorti mon pschitt-pschitt et mon chiffon, mes gants en polypropylène à usage unique, ma fiole de super glu, et j'ai recollé le bouzin (je ne dirais pas proprement, mais je fais ça en dilettante, hein...)
Ne reste plus qu'à prier pour que ça tienne et qu'en ressortant tout à l'heure, je ne retrouve pas le miroir en miettes à côté de Roger. Prier pour que ça tienne au moins jusqu'à demain 10h45 (et promis je vais faire très très attention à tous les petits trous sur la route) et pourquoi pas un peu plus longtemps si ça pouvait m'éviter de racheter un rétroviseur neuf à Roger.

Alors si avec tout ça, Roger est encore recalé demain... Ben je ne sais pas ce qu'on devient.

(Et ça, c'est sans parler de Joséphine, le véhicule de Monsieur, qui fait son intéressante chez le garagiste depuis 1 semaine. Enfin il semblerait qu'elle revienne aujourd'hui ou demain.)

Bref. C'est que des petits tracas, mais ça occupe, surtout quand on a la tête à moitié ailleurs, puis ça finit par coûter. A la fois, on relativise, parce que franchement c'est peanut, mais quand même, on s'en passerait bien.

[Update : Roger a son papier !! Les roues sont droites et le rétroviseur est toujours là, un an de sursis]